
Le journal Le Monde vient de publier, comme il le fait chaque année, une enquête de l’IPSOS sur « les fractures françaises ». Le moins que l’on puisse dire c’est que cette photographie n’invite pas à l’optimisme. Plus que jamais, la France semble se conduire comme une vieille dame déprimée qui se lamente sur ses jeunes années perdues et tremble pour son futur proche.
Ces derniers temps elle n’avait pas le moral, mais en 2020 c’est le gouffre qui s’ouvre sous ses pieds. La Covid 19 est passée par là qui accentue encore plus notre peur de l’avenir. Nous sommes au seuil d’une véritable dépression.
Un des marqueurs les plus significatifs de ce moral en berne , c’est sans doute l’accentuation d’une de nos spécificités : la division !
Les fracturations prolifèrent et s’approfondissent.
C’est le cas par exemple entre les générations. Les « vieux » se replient et ne supportent plus les frasques irresponsables des ados prolongés ; lesquels n’acceptent pas de leur côté qu’on leur impose une discipline qui les prive du plaisir de vivre.
Autre fracturation parmi bien d’autres, celle qui s’approfondit entre ceux que l’on peut appeler les réalistes et ceux qui se veulent idéalistes conquérants. Les premiers nous préviennent que nous ne pourrons échapper aux contraintes de la mondialisation, les seconds de plus en plus certains de leur victoire veulent faire table rase des contraintes actuelles générées par l’économie planétaire. Résultat de la confrontation entre les deux camps : 65% des personnes interrogées estiment que « le pays doit se protéger davantage du monde d’aujourd’hui ».
Ces premiers exemples ne donnent qu’un aperçu des fragmentations qui agitent notre société. Tout se passe ces derniers mois comme si la Covid, par la peur qu’elle suscite, avait dopé et accru notre traditionnelle propension à la division.
Devant la crise économique qui avance à grands pas nous donnons l’impression que nous serons incapables de résister.
Cet état des lieux quasi crépusculaire semble installé à jamais sous l’effet délétère de la Covid.
Mais ce n’est pas certain et l’espoir demeure car l’étude de l’Ifop réserve une surprise de taille. Les Français émettent à 82% un voeu quasiment iconoclaste : ils veulent un chef, « un chef pour remettre de l’ordre ».
On peut douter que ce voeu donne lieu à beaucoup de commentaires dans les médias et dans l’univers des partis politiques ; il est bien éloigné des tendances qui se sont développées ces dernières années dans ces mêmes milieux.
Les commentaires sur ce sujet seront d’autant plus rares que, à dire les choses sans grande précaution, un tel personnage est une denrée peu courante dans nos écuries politiques.
La conséquence logique de l’aspiration exprimée dans ce sondage devrait donner, au départ, un avantage à notre actuel Président .
Mais ce n’est pas certain et l’on doit se poser une double question .
Aujourd’hui est-il vraiment un chef ?
On peut objectivement émettre des doutes. Pour le moment il est essentiellement reconnu comme étant un technicien talentueux de l’économie. Ses réussites en la matière sont réelles et nombreuses. Même si l’arrivée de la pandémie a gommé dans l’opinion publique son succès indéniable en matière de lutte contre le chômage.
Peut-il le devenir ?
Ce n’est pas impossible ! A condition que sur le fond il devienne une référence dans les domaines régaliens. Le sondage est clair et net : il faut rétablir l’ordre. En somme personne ne doit douter qu’il est une force, un recours.
Sur la forme, (et dans ce domaine elle est inséparable du fond) il faut qu’il abandonne ses discours trop longs et trop léchés, aux expressions inutilement provocatrices et trop souvent alambiquées et complexes.
En somme il faut qu’il revête l’uniforme sobre de celui qui est tout en haut de la dunette de commandement lorsque la tempête fait rage.
L’horizon s’obscurcit pour les Français, le coup de vent arrive.
Il savent déjà qu’ils n’ont pas un roi fainéant à leur tête, ils veulent un chef, un vrai !