
Il y a moins d’une semaine le Covid 19 faisait encore la loi. Aujourd’hui tout semble avoir basculé, l’optimisme est quasi omniprésent. On parle même de fin de la pandémie et de nombreux spécialistes décrètent qu’on ne verra pas cette fameuse deuxième vague ,pourtant si redoutée.
Puisque l’orage s’enfuit, on peut commencer faire le bilan de cette période tumultueuse non seulement sur le plan sanitaire mais aussi en matière politique.
Dans ce dernier domaine, une question va dominer : la violence de cette épreuve a-t-elle transformé la perception que les Français ont de leur Président ?
Lorsqu’au début de l’année le coronavirus a franchi nos frontières, certains observateurs ont estimé que c’était une opportunité, un moment décisif pour le Président qui enfin allait pouvoir jeter aux orties sa défroque de bon élève mal aimé.
Le chemin serait plein d’ornières, mais après deux ans de chahut provoqué par les gilets jaunes et les opposants à la réforme des retraites, il allait par la qualité de sa gestion de la crise sanitaire obtenir enfin son grade de leader incontestable.
Ce changement d’image ne serait d’’ailleurs que justice car les trois premières années de son mandat sont loin d’être uniformément négatives.
En effet on ne peut contester que grâce à certaines de ses décisions l’économie était enfin sur de bons rails. En témoigne la baisse très significative du chômage : Sarkozy et Hollande en rêvaient, Macron l’a fait ! Il en va de même pour l’apprentissage enfin établi à sa juste place.
De la même façon, il est bien difficile de ne pas admettre que le « Grand Débat », initié et porté par le Président, a constitué un moment original de démocratie directe comme nous n’en avions jamais connu.
Enfin, comment ne pas remarquer que les opposants de tous bords se sont bien gardés d’admettre publiquement que la mise en place, quasi instantanée ( ce qui est quand même très rare sous le règne de notre administration tentaculaire) du chômage partiel avait évité une vraie catastrophe ?
Aujourd’hui après des mois de gestion de la crise crise sanitaire, force est de constater que le changement d’image n’a pas eu lieu. Les peurs , les rancoeurs se focalisent sur le locataire de l’Elysée. Le Président, qui n’a sans doute pas de rivaux à sa hauteur en matière de gestion de l’économie nationale, se heurte toujours à une forme de rejet d’une partie importante de la population. Subsiste toujours une forme de vindicte irrationnelle qu’illustre en permanence les slogans de « président des riches » ou de grand banquier insensible au sort des plus faibles. Un mot résume à lui seul le rejet : « l’arrogance ».
Qualificatif d’autant plus paradoxal qui est prononcé par ces même Français qui eux aussi subissent la même critique de la part de la terre entière.
Les milliers de morts de l‘épidémie n’y changeront rien, l’image du Président est encore trop souvent négative.
Emmanuel Macron perçoit bien évidemment sa responsabilité dans le maintien de cette fracture et tente parfois d’y remédier par des initiatives aussi originales qu’incomprises. C’est par exemple le cas lorsqu’il croit faire « peuple » en téléphonant à Jean-Marie Bigard le plus drôle ( parfois) et le plus vulgaire ( toujours) de nos comiques.
Ce type d’initiative n’est qu’un leurre sans grande efficacité !
Sa prétendue arrogance trouve bien sûr son origine dans l’utilisation de phrases à l’emporte-pièces (du style « pognon de dingue » pour parler de dispositions d’aides sociales). Mais la raison profonde de l’incompréhension, de l’arrogance, il faut plutôt la rechercher dans la forme de ses discours à la Nation. La forme, que l’on croit pourtant accessoire, parasite en réalité le fond..
Pratiquement toujours trop longs, les discours d’Emmanuel Macron ( 27 et 25 minutes pour les deux derniers) exigent un effort d’attention de même nature que celui demandé par un cours magistral à la Sorbonne.
Même si le vocabulaire se veut simple, les Français décrochent assez vite et ne peuvent supporter ce très long exercice qu’ils croient réservé aux élites. L’arrogance est là ! Et ceci d’autant plus que des rajouts sans réel intérêt viennent souvent troubler l’essentiel du message. C’est ainsi que si dans son discours du 12 mars il a prononcé six fois le mot essentiel de « guerre », il en a atténué le message dominant en nous conseillant de « retrouver le sens de l’essentiel », et en précisant aussi que « la culture, l’éducation, le sens des choses sont importants ». Choses de valeur sans doute mais dont la longue mention a sournoisement trans formé le général en chef si nécessaire à son pays, en pédagogue et psychothérapeute inutiles.
Par rigueur et par honnêteté intellectuelle Emmanuel Macron veut toujours et longuement expliquer contrairement à beaucoup de Français qui jugent l’exercice fastidieux et se mettent très vite aux abonnés absents.
En définitive les Français veulent moins de paroles, moins de technicité et moins de culture affichée. Ils acceptent le ton churchilien « du sang et des larmes », ils veulent surtout du charisme à la De Gaulle. Cette vertu ne se trouve pas évidemment pas sur les bancs de l’E N A . Elle est parfois apportée aux jeunes ambitieux par l’expérience accumulée et les échecs antérieurs.