La marmite

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L’Express

 

La marmite commence à bouillir et dans un mois le plat sera sur la table.

Le 5 décembre la grève illimitée commencera à la SNCF, et dans d’autres entreprises publiques, comme la RATP.

La France et son économie vont être paralysées, comme en 1995, parce que les salariés les plus protégés de notre pays pendant leur vie professionelle continueront d’exiger que leur situation privilégiée subsiste, en particulier avec un départ très précoce à la retraite. L’espérance de vie augmente et plombe de plus en plus les comptes publics : qu’importe l’oasis du rail n’a que faire de ce paramètre.

A l’époque Chirac avait cédé et ainsi commis l’une de ses plus grandes erreurs. Emmanuel Macron calera-t-il lui aussi ?

Si c’est le cas, les mêmes causes produiront les mêmes effets et pour l’essentiel le quinquennat ne sera plus qu’une illusion de pouvoir . On saura à la fin de cette année si le Président évite l’épreuve de force et se « défile » devant l’obstacle. Dans cette hypothèse il nous faudra encore attendre qu’un véritable un homme d’Etat siège à l’Elysée. Nous devrons encore nous contenter  d’un homme politique ordinaire.

Les paris à ce sujet sont ouverts, mais ils ne ne sont en rien évidents compte tenu de l’exemple ambigu du traitement du mouvement des gilets jaunes. Et cela même si, n’en déplaise à ses contempteurs habituels, le bilan actuel est très loin d’être nul. En témoignent les différentes réformes mises en place et les  résultats déjà obtenus en matière de chômage ou de niveau de vie.

Mais l’interrogation se situe ailleurs.

Elle réside dans la capacité d’Emmanuel Macron à modifier son image, à l’occasion de cette épreuve qui s’annonce particulièrement ardue.

Aujourd’hui cette image repose quasi exclusivement sur ses qualités intellectuelles exceptionnelles, qui en ont fait, très jeune, un membre éminent de nos élites technocratiques.

Adossé à cette réalité, il espérait recevoir, en retour, l’admiration de la très grande majorité  des Français.

Au final il n’en est rien. Son intelligence irrite . Son discours trop long, analytique et savant « n’imprime pas ». Du coup les Français le traitent d’arrogant insupportable.

Désormais, pour être plus largement respecté, voire aimé, il lui faudra faire la preuve qu’il possède la qualité indispensable aux grands dirigeants : le courage, en particulier celui de résister à la démagogie des mécontents de tous bords.

Arrivé au pouvoir par surprise et par la grâce des insuffisances  de son prédécesseur, il lui faut désormais prouver qu’il a franchi une étape décisive.

Celle où, contesté par le pouvoir de la rue qui pratique un véritable chantage, il préfèrera sauver la démocratie représentative désormais mise gravement en danger. Pour cela il lui faudra peut-être se résoudre à dissoudre, s’il le faut, l’Assemblée Nationale (malgré le désastreux exemple de 1997), et organiser de nouvelles élections. Il risquera d’y perdre tout ou partie de son énorme majorité . Mais il aura gagné le respect des Français qui constaterons qu’il est prêt à assumer les plus grands risques pour pouvoir réaliser la promesse la plus importante de sa campagne électorale.

Ce courage, ce manque de « trouille » selon le titre d’un article du Point, calmerait bien des contestataires irresponsables, et apporterait le preuve qu’un nouveau monde est en train de s’installer.

Celui où la France ne cède plus devant des intérêts catégoriels d’un autre temps.

Intérêts qui aujourd’hui pèsent lourdement, et sans grande justification, sur la vie de tous les Français.