Le prophète de Montboudif

images
Libération

 

La semaine dernière, les médias se sont fait les échos d’un colloque qui se tenait à l’occasion du cinquantenaire de la mort de Georges Pompidou. Aujourd’hui son nom ne dit pas grande chose à la très grande majorité des Français. Et pourtant …La comparaison, entre l’état actuel de certaines de nos entreprises et les options stratégiques mises en place par ce Président de la République à la fin des années 60, est dramatiquement éloquente !

Très combatif, lors d’une conférence de presse, en 1970, il affirmait :

« chère vieille France, le temps de la haute couture est terminé. La France désormais a entamé sa révolution industrielle. Elle est  enfin compétitive dans le domaine des prix et même dans celui des techniques ».

Ces affirmations ne relevaient pas de l’intoxication politicienne. Ce n’était pas du vent et nous avons connu effectivement des développements considérables dans le domaine de la sidérurgie , de la construction aéronautique, l’aérospatial etc.. .Le temps de la modernité et de la créativité s’installait.

Aujourd’hui la comparaison avec cette époque est souvent défavorable. Nous ne sommes manifestement plus des conquérants dans bien des domaines. Trop pessimistes peut-être, nous n’entendons plus parler que de coupes sombres dans notre industrie.

C’est le cas avec la disparition programmée du site Ford de Blanquefort au Sud, d’Ascoval à l’Est, de Westinghouse dans le Nord et maintenant de Général Electric à Belfort etc.

C’est toute une culture et un savoir-faire qui disparaissent.

Le pire des exemples nous est donné par EDF.

Celle-ci, nous couvre de ridicule aux yeux du monde entier.

Nous étions parait-il, les champions de la filière nucléaire  avec nos futures centrales EPR.

La réalité est bien différente : au minimum nous sommes considérés comme  des fantaisistes,

En 2007 le chantier de Flamanville devait durer 5 ans pour un coût de 3,3 milliards d’euros. Finalement il s’étalera sur quinze ans… pour une facture estimée à 11 milliards d’euros. Quelle référence !

Avec ces exemples la compétitivité technique annoncée par le Président Pompidou disparait.

Nous en sommes même au point où nous ne savons plus faire les soudures qui constituaient pourtant l’une de nos compétences distinctives élémentaires.

Et pendant ce temps-là les Chinois avancent et depuis un an font déjà tourner une centrale EPR. L’élève est loin devant le maître !

En définitive les rêves raisonnables de Georges Pompidou se transforment trop souvent en cauchemars pour au moins deux raisons :

   Sous l’influence de théoriciens qui se prétendaient perspicaces, nous avons cru que la grande industrie appartenait au passé et qu’il fallait de toute urgence privilégier les services. En somme nous avons abandonné la proie pour l’ombre. Ce que n’ont pas fait les Allemands. Aujourd’hui ils dominent,  et de très loin, l’économie européenne.

Et puis deuxième raison, toujours la même. Nous ne voulons toujours pas admettre que nous ne sommes pas seuls sur cette planète, que la concurrence est incontournable ! L’Histoire est en train de basculer et nous ne voyons pas que notre maison s’effondre.

Et pourtant le fils de l’instituteur de Montmoudif ( Cantal) nous avait montré le chemin, il y a 50 ans. Notre niveau de vie devait passer par notre ambition et notre créativité dans un domaine, l’industrie, que trop souvent nous négligeons.

Au fond des choses, une question s’impose aujourd’hui  : quelles ont été les fondations les plus solides ? Celles posées par Georges Pompidou ou celles installées par François Mitterand ? L’un est presque oublié, l’autre est vénéré comme une sainte icône. L’un était rugueux comme le granit de ses montagnes, l’autre doux et fuyant comme le sable de sa Charente. Cinquante ans après la mort de Georges Pompidou, on a l’impression que peu à peu l’Histoire est en train de dépasser les apparences.