
Quelle que soit l’issue de leur mouvement, les gilets jaunes auront eu au moins un mérite ,celui de braquer les projecteurs sur le virus quasiment mortel qui envahit le domaine de l’information, les « fake news », les mensonges, les plus énormes de préférence.
Nous avons cru pendant longtemps que nous étions à l’abri de la maladie. Celle-ci semblait être réservée à nos amis anglais et américains.
Les premiers ont en effet choisi le Brexit sous l’effet dévastateur des élucubrations de Boris Johnson et de ses disciples, les irresponsables ayatollahs de la rupture.
De la même façon, Donald Trump a conquis la Maison Blanche en racontant tout et n’importe quoi sur sa concurrente Hillary Clinton. Grand compétiteur, il continue aujourd’hui sur sa lancée et peut se vanter d’avoir proféré plus de 7000 mensonges, à l’aide, entre autres, de ses tweets ravageurs. Et l’on se demande de plus en plus aujourd’hui si c’est le déséquilibre mental ou le Kremlin qui les inspirent.
Mais au final la même maladie éclate en France, au grand jour, à un rythme accéléré depuis quelques mois : les fakes news sont dans l’hexagone ; et certains gilets jaunes en sont les plus brillants utilisateurs. La plus monstrueuse des fariboles étant la fake news laissant entendre que c’est le gouvernement qui, pour détourner l’attention, aurait organisé l’attentat meurtrier de Strasbourg.
On en est là, et ce n’est pas près de finir !
Parmi toutes les causes de ce désastre on peut en isoler au moins deux.
D’abord évidemment, l’existence du web et de ses réseaux sociaux. Leur pouvoir en matière d’information n’en est qu’à ses débuts, mais il est déjà immense. Parce que Facebook et ses confrères ont donné à la quasi totalité de la population un cadeau extraordinairement attrayant, quasiment jouissif . Désormais tout un chacun, sait qu’il possède le pouvoir surréaliste, mais bien réel, de pouvoir communiquer sa pensée et ses désirs à des millions de personnes et qu’ainsi le monde est à ses pieds et, peut être à son service. Ensuite parce que dans cet univers en expansion, le contrôle de la vérité est inexistant, la sanction du mensonge encore plus nébuleuse et lente.
La liberté de l’information allait de pair jusqu’alors avec l’honnêteté et la responsabilité ; ce n’est hélas plus le cas .
Et ce n’est pas fini, puisque les médias traditionnels sont de moins en moins consultés, voire même disparaissent du paysage pour certaines catégories de Français. C’est par exemple le cas pour la catégorie d’âge des 18-24 ans. Selon une étude parue il y a quelques jours, ces derniers n’écoutent plus la radio, ne lisent plus les quotidiens nationaux et n’ouvrent jamais un magazine. Il est vrai que Facebook précipite encore plus le désastre en adoptant un algorithme de plus en plus pénalisant pour les médias traditionnels.
Est-ce à dire que les réseaux sociaux sont les seuls responsables de ce véritable tsunami de fake news ? Certainement pas ! les médias traditionnels en ont une large part ! Ils sont devenus des seconds rôles parce qu’ils ont accepté trop souvent de n’être que de simples caisses de résonance des affabulations de certains. Et de ce point de vue nos chaînes d’information ont une vraie responsabilité.
N’oublions pas non plus les contraintes économiques de la presse écrite, contraintes dont on ne parle pratiquement jamais. Avec le modèle économique qui est actuellement le leur, les journaux, et tout particulièrement les nationaux, foncent, tels des Titanic, inexorablement vers leur fin quasiment programmée. Leur prix ( par exemple 2 euros 80 pour le Monde et les Echos) est totalement dissuasif et laisse la part belle aux flibustiers du web. On assiste à la paupérisation de l’info et donc, en contre partie, à la prédominance des galéjades.
Le pessimisme est de rigueur, mais un espoir subsiste car ces derniers jours ont été marqués par un air rafraichissant. La parole semble se libérer, les journalistes se rebellent devant la chasse aux sorcières dont ils sont trop souvent les victimes et surtout la désunion semble se répandre dans les rangs de l’inquisition.
Le grand débat lancé par Emmanuel Macron n’y est certainement pas pour rien. Pour ou contre, quels que soient les participants, les problèmes sont abordés. On va peut être, enfin, pouvoir faire un tri dans ce que certains estiment absolument nécessaire. Il paraît que selon Jacques Chirac c’est précisément la mission du politique : rendre possible ce qui est nécéssaire. Cette sagesse presque d’un autre âge est très éloignée des fake news des populistes d’aujourd’hui.