
Le discours d’Emmanuel Macron a vraisemblablement été l’un de ses meilleurs depuis sa prise de fonction : court, tout en retenue mais porteur d’annonces concrètes.
Dans ces conditions il est possible que le conflit s’apaise peu à peu, mais ce n’est pas du tout assuré .
Certain des gilets jaunes grisés par leur premiers succès se pensent proprement irrésistibles car ils croient posséder deux armes décisives :
– D’abord l’impopularité du Président
Emmanuel Macron a voulu aller trop vite.
Trop vite vers le nouveau monde, celui de la « start-up nation », du web, de l’informatisation à marche forcée. Il a sous-estimé les freins qui dans notre pays s’opposent à ces bouleversements pourtant inévitables
Trop vite aussi vers un nouveau style de Président, à l’exact opposé de celui de son prédécesseur.
Hier les Français qui voulaient un vrai roi tel que le leur promet la constitution, n’avaient eu qu’un intendant pinailleur et indécis. Pour cette raison ils l’avaient mis à la porte
Aujourd’hui ils ont Jupiter le roi des rois, et beaucoup de Français ne supportent pas ce qu’ils appellent son arrogance. Ils exigent le juste milieu
La deuxième arme des gilets jaunes c’est bien évidemment le soutien de l’opinion publique.
A s’en tenir aux paramètres habituels, ce soutien devrait avoir disparu depuis au moins 15 jours. Mais rien n’y fait ; même pas les saccages, le vandalisme et les scènes de guerre.
Profitant de cet état de grâce ils veulent toujours plus . Qu’importe la dette immense de l’Etat qui, de leur fait, risque de grossir encore plus, au moment même où il est objectivement impératif qu’elle diminue.
Leur postulat est clair : ils sont le peuple à qui l’on doit tout, même la déchéance du roi. L’instinct régicide est là ,tout près. Louis XVI, Kennedy, Macron même fin pour les plus fous d’entre eux. Ils rêvent d’échafaud !
On va bientôt voir si ce délire va continuer à recevoir l’onction des Français après le discours du Président.
Il est bien possible que les premiers cadeaux sonnants et trébuchants annoncés hier constituent un premier accroc dans le pacte implicite qui existe jusqu’alors entre les gilets jaunes et l’opinion .
Les Français vont peut-être enfin, considérer que cette fois le compte est bon
Le divorce va être long et difficile car les Français en difficulté resteront attachés à ces phalanges déchainées qui leur auront apporté, en quelque sorte par procuration (et sans diminution de leur salaire mensuel), des avantages qu’ils n’osaient plus espérer . Parce qu’aussi, de leur côté, les gilets jaunes, complètement grisés par leurs premiers succès, croient dur comme fer que cet accord avec les Français est quasiment éternel .
Ils disent tout et n’importe quoi, changent de demandes selon les barrages, les lieux et l’heure … et pourtant, toujours jusqu’alors, les Français, contre toute logique et bon sens les ont suivi dans leurs folles obsession.
Eux les modestes, les derniers de cordées, les frustrés de la réussite professionnelle sont persuadés qu’ils vont à leur tour créer un nouveau monde. Macron, le mauvais roi, l’a fait, pourquoi pas eux ! Encore un effort, ils ont déjà atomisé partis politiques et syndicats. La voie royale leur est ouverte vers le Nouveau Monde
Ils ne savent pas où celui-ci se trouve. Qu’importe, ils partent à l’aventure. Ils n’ont pas de boussole, seulement des paroles bruyantes, discordantes et folles. Qu’importe si Marine et Jean Luc n’ont de cesse de vouloir les récupérer. Le populisme n’est pas pour eux un gros mot. C’est l’instrument de leur revanche sur les élites.
Mais depuis hier soir, la tempête a peut-être faibli. Les Français savent désormais qu’ils ne pourront plus tergiverser, ils vont devoir choisir.
Choisir entre l’intégration dans le monde moderne, de plus en plus difficile, exigeant et trop souvent sans âme ; et celui complètement irréaliste, parfois totalement déjanté tel que le leur fait miroiter la congrégation des gilets jaunes.
Depuis hier nous avons le choix entre la modernité assumée et la révolution rétrograde des nouveaux sans-culotte.