LE COUCOU

 

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RFI

 Le premier cours que Laurent Wauquiez a donné à l’E N M Lyon a connu un succès retentissant. Désormais le Président des Républicains n’aura plus besoin de son éternelle parka rouge pour se faire remarquer dans la foule des politiques.

Depuis 4 jours la France entière est focalisée sur sa prestation, ses jugements à l’emporte-pièce : « Merkel est transparente, Darmanin va disparaître du circuit, Nicolas Sarkozy est un paranoïaque qui faisait espionner ses ministres, etc, etc …). Sans parler de ses justifications paradoxales ( « quand je parle en public je ne dis que des fadaises »)  et de ses menaces à l‘encontre de la presse, presse dont il est pourtant un des utilisateurs les plus constants et les plus directifs.

En définitive, on a l’impression qu’en matière d’escalade verbale, Donald Trump a trouvé dans l’Hexagone un rival de grande classe.

Comment expliquer cette sortie aussi indécente que violente? Deux hypothèses :

La première, c’est celle du « pétage de plomb » d’un homme politique , grisé par sa réussite. Plus rien ne va l’arrêter, son « ego » triomphe, il est persuadé qu’avec la présidence des L R, il a atteint la voie royale pour conquérir le pouvoir. Le jeune loup domine enfin la meute des grands fauves. Il a posé en principe que les futurs chefs d’entreprise de l’E N M Lyon étaient de sa famille et qu’en conséquence ils ne pourraient qu’adhérer à son langage . Entre ambitieux, on ne peut que se comprendre, n’est-ce pas !

Cette première hypothèse a sa part de vérité, mais elle est un peu courte.

La deuxième est plus complexe et peut-être plus en harmonie avec les qualités et les défauts du personnage.

Ce dérapage c’est beaucoup plus que le résultat d’une griserie temporaire. Ce n’est pas de l’inconscience, c’est en fait la confirmation d’une tactique et d’une stratégie.

La tactique c’est de faire toute sa place au monde nouveau qui est arrivé.

Les anciens premiers rôles ( Merkel, et surtout Sarkozy) sont en voie de disparition. La vedette actuelle ( Macron) est surcotée, il n’est qu’un imitateur. La preuve, comme lui le grand Wauquiez, « il se met en bras de chemises pour faire cool ».

Lui, le nouveau « musher » de la Droite a d’autres ambitions que de caresser les dinosaures . Il choisit ses chiens et ses bagages. Pas question de s’encombrer des débris du passé. Rassembler toute la famille n’est vraiment pas son objectif ; les anciens n’ont plus leur place derrière le jeune loup dominant.

La stratégie est tout aussi brutale.

Pour lui, il faut rejeter les atermoiements et finasseries de la droite complexée. Sa démarche consiste prioritairement à s’adresser bien sûr à la droite dure et nostalgique ( celle de Fillon qui a perdu l’imperdable), mais aussi à l’extrême- droite qui, de plus en plus, traîne comme un boulet, les criantes insuffisances de Marine Le Pen.

S’il séduit ces revanchards ( et aujourd’hui le FN  est déjà un marché largement accessible) , et si l’actuel Président échoue sous les tirs croisés de toutes les oppositions, il n’aura plus qu’à dire « laisser venir à moi les petits enfants de la droite modérée et du Centre ». Et le portail d’entrée à l’Elysée s’ouvrira largement…

Ce calcul est tout, sauf farfelu ; le problème c’est qu’il repose pour l’essentiel sur la décrépitude actuelle du Front National. Or il  n’est pas du tout certain qu’elle perdure, surtout si Marine Le Pen passe la main.

Nicolas Sarkozy qui a été déterminant dans l’ascension finale de Laurent Wauquiez, doit ces jours-ci être bien amer. Il aura fait le nid d’un drôle d’oiseau.

Cristophe Castaner le Délégué général  de La République en Marche parle du « perroquet du F N », ce qui est peut-être trop méprisant.

La réalité de la volière, conduit plus équitablement à affirmer que l’animal en question est surtout un coucou.

Oiseau squatter qui, depuis son entrée en politique, pratique sans arrêt le changement d’écuries ; hier celle de Jacques Barrot, puis de Sarkozy, puis  de Fillon, et enfin, à nouveau, celle de  Sarkozy, qu’il vient encore de trahir une dernière fois.

Le coucou est ingrat, il oublie toujours de se souvenir et de remercier son prédécesseur. Dommage et quel gâchis !